Informations pratiques
14H - 16H30
Séance 5 – L’Autre au miroir du singe
Lys Alcayna-Stevens : L’altérité animale dans un « sanctuaire » de chimpanzés catalan
La communication se fera en anglais / la discussion en français et en anglais
Les anthropologues intéressés par les relations entre animaux et humains dans l’aire culturelle euro-américaine soulignent souvent les contradictions apparentes dans la façon dont les scientifiques (ainsi que les non-scientifiques) conceptualisent les animaux et interagissent avec eux. Par exemple, il n’est pas inhabituel pour un scientifique de décrire une souris de laboratoire en termes mécanomorphiques – des termes qu’il pourrait même étendre aux animaux en général. Cependant, on serait surpris si le même scientifique le faisait avec son propre chien de compagnie. En me basant sur des recherches ethnographiques dans un sanctuaire de chimpanzés, je développe le concept de « double pensée » pour donner un sens à l’existence de ce qui apparaîtrait côte à côte comme des perspectives incommensurables. En faisant référence au travail de Gilles Deleuze, je soutiens que le concept peut être largement utilisé pour rendre compte de l’altérité animale et humaine.
Vincent Leblan : Collecte de chimpanzés et fabrique des identités raciales à l’Institut Pasteur de Kindia, Guinée française, 1920-1930
La diversité de connaissances, de compétences et d’intérêts appelés à se côtoyer pour produire des spécimens à destination des muséums témoigne des ajustements relationnels et cognitifs qui caractérisent toute rencontre entre des protagonistes dont les attentes sont enracinées dans des univers sociaux et des cultures (épistémiques) en décalage. En ce qu’elles supposent de rendre leurs perspectives au moins partiellement commensurables les unes aux autres, les opérations de collecte constituent une sorte de laboratoire de mise au jour, et de mise à l’épreuve, des idées que l’on se fait de l’Autre. Cette communication s’intéresse au contexte des premiers modèles simiens pour la recherche sur les maladies infectieuses au sein de l’empire colonial français. Dans ce cadre, l’administration coloniale organisa des battues de singes en Guinée afin d’approvisionner l’Institut Pasteur, certains spécimens ayant aussi été orientés vers la ménagerie du Muséum national d’Histoire naturelle. Nous traiterons de l’économie morale de la politique de captures et de soins apportés aux primates en précisant le rôle joué par ces spécimens vivants dans la qualification de l’Autre par les acteurs de la science coloniale. Les enjeux liés à l’altérité sont d’autant plus prégnants dans ce cas de figure que les singes eux-mêmes étaient situés, tant pour les colons que pour les colonisés, aux frontières de l’humain, tout en leur accordant des significations divergentes et sans doute irréconciliables. L’action même de la collecte des singes put cependant converger occasionnellement sur des objectifs utilitaires.
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